18 janvier 2023, par François Couture
Plus tôt cette année, un milieu membre de CASIOPE, le CPE Soleil Levant, avait le souci de
soutenir ses éducatrices au regard de la qualité des interactions et plus particulièrement par
rapport aux interactions de soutien à l’apprentissage. De là s’est créé un espace de réflexion
pour soutenir le développement des compétences de l’équipe éducative.
Récemment, j’ai eu la chance de m’entretenir avec deux de mes collègues, Sophie Roy et Annie
Cameron-Turgeon, toutes deux consultantes, observatrices et formatrices aux outils CLASS® qui
ont vécu cet accompagnement. Lors de notre rencontre, nous avons échangé sur leur
expérience de soutien du CPE Soleil Levant. Nous avons exploré le processus mis en place pour
accompagner ce milieu et discuté des impacts sur les différents acteurs impliqués.
Le milieu avait comme objectif d’avoir un portrait des interactions de chacune des éducatrices
afin de pouvoir les soutenir à partir de faits objectifs. Pour y arriver, voici les étapes qui ont été
réfléchies entre le CPE et CASIOPE. Ensemble, le milieu et les deux consultantes, Annie et
Sophie, ont établi un plan, ce qu’on appelle à CASIOPE, un plan de soutien du milieu (PSM), qui
s’est échelonné sur environ six mois. Ce plan impliquait autant les directrices que les
éducatrices de ce CPE. La première étape a été la mise en œuvre de trois ateliers auprès des
équipes et la deuxième étape, l’observation des éducatrices avec l’outil CLASS® par les
consultantes de CASIOPE. Comme le milieu est composé de deux installations avec deux
directrices adjointes, chacune des consultantes a pris en charge une installation. Les trois
thèmes des ateliers ont été déterminés à la suite de l’analyse du rapport d’évaluation de la
qualité éducative du ministère de la Famille.
C’est lors de ces moments que les consultantes ont progressivement préparé l’équipe
éducative à la deuxième étape, c’est-à-dire, l’observation individuelle avec les outils CLASS®,
suivie d’une rencontre de rétroaction individuelle.
Cette planification a été réfléchie avec l’équipe de direction avant d’être entérinée par le
conseil d’administration qui voyait dans cet accompagnement, la continuité des pratiques déjà
en place dans le milieu. Dans ce billet, je porterai un regard spécifique sur la seconde partie du
plan, soit les observations individuelles accompagnées d’une rencontre de rétroaction. Je vous
ai décrit la première partie du plan pour mettre en lumière les conditions préalables à mettre
en place afin d’assurer l’adhésion de tout le personnel à ce processus. Les ateliers ont, en effet,
permis de créer un lien entre les consultantes et l’équipe, de les rassurer sur l’observation à
venir, de connaitre et comprendre la qualité des interactions en lien avec le soutien à
l’apprentissage. Ces conditions ont ainsi permis aux éducatrices d’être moins stressées, plus
motivées et mobilisées dans la démarche. Elles ont nommé cet impact sur elles, mais surtout
elles le démontraient dans leur pratique. Par exemple, lors des différents passages des
consultantes dans le milieu, les éducatrices les interpellaient afin de valider les changements
qu’elles avaient mis de l’avant dans leurs pratiques en lien avec les ateliers (par exemple des
changements apportés à leur tableau de planification).
Les consultantes de CASIOPE ont donc mené une observation valide avec l’outil d’observation
CLASS® pour chaque éducatrice. Par la suite, elle rencontrait chacune d’entre elles afin de leur
transmettre objectivement leurs forces de même que leurs zones d’amélioration, tout en
proposant des stratégies concrètes issues des outils CLASS®. Lors de ces rencontres, la
directrice adjointe était présente et, dans le but de soutenir le dialogue, les consultantes
offraient, à l’éducatrice et à la directrice, un canevas de prise de note avec les composantes de
l’outil CLASS®.
Du côté des consultantes, ce fut une expérience enrichissante. Elles ont eu l’occasion d’utiliser
les outils d’observation sur le terrain plutôt qu’en vidéo. Cette mise en pratique leur a permis
de consolider leur compréhension du CLASS® et d’optimiser leur prise de note. De plus, la
rédaction des rapports pour chacune des éducatrices les a amenées à noter des éléments
d’observation concrets afin de rendre explicite leur rétroaction. Elles m’ont aussi nommé
qu’elles étaient en mesure de voir les impacts du niveau de qualité des interactions sur les
enfants. Lors de ce processus, elles ont de plus posé un regard sur elles-mêmes : « si c’était à
refaire, comment pourrions-nous faire différemment ou mieux? » Le grand constat : s’allouer
plus de temps puisqu’il s’agit d’une tâche colossale.
Du côté de l’équipe de direction, il y a également eu des gains. Pour une directrice adjointe qui
est dans le milieu depuis plusieurs années, le constat a été : « je reconnais mes éducatrices
dans le rapport d’observation faite par la consultante. C’est rassurant de constater que l’outil
est fidèle à la réalité, mais aussi ça me rassure sur mes propres observations ». Pour l’autre
directrice adjointe, nouvellement arrivée, ce processus lui a permis d’avoir une photo de son
équipe : « en lisant les rapports : ça me permet de mieux connaitre mon équipe et leurs
besoins ». À la suite de cet accompagnement de CASIOPE, les 2 directrices ont pu mettre de
l’avant des modalités d’accompagnement sous diverses formes : groupes de soutien par
tranche d’âge (poupon, trottineur, préscolaire), acquisition des Guides des dimensions CLASS®
et accompagnement individuel.
Allons maintenant voir les impacts nommés et observés chez les éducatrices. Elles ont
consciemment mis de l’avant des interactions de soutien à l’apprentissage auprès des enfants
telles que des échanges aller-retour ou des questions ouvertes. Lors des observations, certaines
éducatrices en étaient à leur troisième expérience d’observation avec l’outil CLASS®
puisqu’elles avaient vécu le projet-pilote de l’UQAM pour valider la mesure d’évaluation et
d’amélioration de la qualité éducative des services de garde éducatifs à l’enfance du ministère
de la Famille, de même que l’observation au CLASS® lors de cette mesure officielle dans leur
milieu. Pour ces éducatrices, la pression d’être observées n’était plus nécessairement un enjeu,
mais cet accompagnement leur a permis d’avoir une rétroaction personnalisée. Elles ont
également nommé que l’annonce de l’observation les avait mises en action pour mettre en
pratique les apprentissages faits lors des précédents ateliers. Les rencontres de rétroaction leur
ont offert l’espace-temps nécessaire pour analyser leurs pratiques et cibler les ajustements à
mettre en place. Non seulement la qualité des processus (interactions) a pu être bonifiée, mais
aussi la qualité structurelle. Par exemple, une éducatrice a constaté que le fait de faire une
table plutôt que deux au diner lui permettrait de soutenir plus efficacement les interactions
des enfants. Après la rencontre de rétroaction, les éducatrices identifiaient leur objectif de
développement professionnel dans leur cycle d’accompagnement avec leur directrice
respective.
Finalement, ce plan de soutien du milieu a permis à tous les acteurs d’en tirer des gains. Les
consultantes ont consolidé leurs pratiques d’observation avec l’outil CLASS®. Les directrices
adjointes ont eu accès à de l’information objective sur la qualité des interactions offertes aux
enfants, ce qui leur permet d’accompagner leur équipe plus efficacement. Les éducatrices ont,
pour leur part, pris conscience de l’importance d’offrir des interactions de qualité puisqu’elles
ont approfondi leur compréhension des liens entre leurs interactions et les effets sur le
développement des enfants. Les enfants sont, bien entendu, le cœur de cette démarche. Grâce
à celle-ci, ils ont accès à des interactions de meilleure qualité et comme le stipulent les outils
CLASS®, un petit changement de pratique engendre de grands gains pour le développement.
Bref, cette démarche a permis à tous les acteurs d’être gagnants, de consolider leurs
apprentissages, d’être valorisés et rassurés dans leurs pratiques, peu importe leur rôle.
Auteur : François Couture
Relecture: Julie Dion, Sophie Roy, Annie Cameron-Turgeon et Karine Busilacchi
